Samuel Benchetrit

Les Chroniques de l’asphalte 4/5 (Grasset)
Douze ans après le dernier tome des Chroniques de l’Asphalte, nous retrouvons la bande de copains vivant dans une cité HLM au milieu des années 80.
Les voici ici confrontés à l’art sous toutes ses formes : émerveillés, obsédés et influencés par la culture, encore omniprésente dans les quartiers à cette époque.
Au fil des chroniques, nous suivons Karim, Daniel, Dédé, Samuel et les autres, à la représentation d’un spectacle de danse contemporaine, au tournage du clip « l’Aziza » de Daniel Balavoine, au premier one man show de Smaïn…
L’un essaie d’apprendre un poème de Verlaine grâce à une drôle de méthode ; un autre, à la voix de crécelle, de séduire une fille qui n’aime que le chanteur de U2 Bono ; un autre, de regarder Canal+ sans décodeur ; un autre de devenir Rasta après avoir été Skinhead…
Les photo-clubs sont ouverts, les salles de cinéma pleines, le bicentenaire de la révolution va être fêté, on joue à L’agence tout risque dans les caves, les casses de voitures et les parkings, les mères regardent Véronique et Davina à la télé pour faire du sport, les pères regardent aussi, sans faire de sport. Il y a celui qui rate le film du dimanche soir pour se débarrasser de cendres encombrantes, celui qui a failli mourir le jour où Coluche est mort…
Et cette question fondamentale : Qui est le mieux coiffé, de Jean-Pierre Foucault et de Patrick Sabatier ? Peut-être Michel Drucker !
Maman (Grasset)
Une nuit, une femme ferme son magasin de vêtements pour femmes enceintes.
Elle porte un manteau de fourrure, attend un taxi.
Un jeune homme l’aborde, la prenant pour ce qu’elle n’est pas.
Elle va le prendre pour ce qu’il est…
Reviens (Grasset)
Son fils est parti, son ex-femme le harcèle, son éditeur le presse, des mariées de télé-réalité le fascinent, Pline l’Ancien le hante, un canard le séduit, une infirmière bègue le bouleverse… Bienvenue dans le monde tendre et poétique d’un écrivain en quête d’inspiration et d’amour.
Un feu d’artifice tout à tour grave, hilarant et émouvant.
Chien (Grasset)
« Je ne pouvais pas trop regarder mon fils jouer avec le chien de notre petite voisine parce que ma femme me parlait :
— La peau me brûle, je perds mes cheveux et mes ongles jaunissent. Je suis allée consulter un spécialiste, le docteur Zenger, et figure-toi qu’il a fini par trouver la cause de cette maladie… Tu veux connaître la cause, Jacques ?
— Oui.
— C’est toi… C’est toi, Jacques !
— Moi ?
— Oui. D’ailleurs, tu apprendras que désormais cette maladie porte ton nom, c’est une Blanchoïte aiguë. (Je m’appelle Jacques Blanchot.) Pour le moment, il n’y a rien à faire pour la soigner. Ni traitement. Ni crème. Alors… il faudrait que tu partes.
— Quand ça ?
— Maintenant… »
Bienvenue dans le roman le plus déjanté, drôle, tendre et cruel de notre monde contemporain où « l’homme est un chien pour l’homme ».
Les Chroniques de l’asphalte 3/5 (Grasset)
« Quand je l’ai rencontré, il arrêtait pas de me toucher, de me prendre dans ses bras, de m’embrasser le cou, de me réchauffer la nuque… Au début je comprenais pas, j’avais l’impression d’être une bête… et puis, à force de contact, je m’y suis mise… Ah c’est doux, t’as pas idée… Ce gamin, j’ai même pas l’impression d’avoir dû faire l’amour pour qu’il arrive… C’est juste un cadeau… Et si t’ouvres ton cœur, tu pourras aussi en profiter… C’est ça que je te propose… De combler le vide… Maintenant, si t’as pas envie qu’il y ait plus d’amour dans ta vie, c’est toi que ça regarde… Moi, le bonheur, je saute dessus, et je pense pas à après… »
Le cœur en dehors (Grasset)
Ce roman, c’est l’histoire de Charlie Traoré, un gamin (dix ans), black d’origine malienne, adorable, vivant en banlieue, entre la Tour Rimbaud et la Tour Simone de Beauvoir, et dont tout l’univers se résume aux copains, à une amoureuse prénommée Mélanie, à son frère drogué, et à sa mère surtout – qui, au début du livre, est « appréhendée » par la police car ses papiers ne sont pas en règle. Pendant toute cette journée (les chapitres du livre, d’ailleurs, se contentent d’être titrés par l’heure qui tourne), Charlie va errer dans sa cité. Il va chercher son frère Henry, rendre viste à des braves gens, frôler des voyous, jouer au foot, sécher l’école, rêver, suivre ses folles associations d’idées, ses digressions d’enfant-adulte, attendre sa mère, si douce, si aimante… Mais ce roman, c’est surtout une langue, un style, une vision innocente du monde. Ici, c’est Charlie qui parle, pense, regarde – et il est alors difficile de ne pas évoquer à son sujet le légendaire Attrape-cœur de Salinger. Car le petit Charlie est vraiment attachant et le regard qu’il pose sur sa « cité » sordide et magnifiée est, à chaque ligne, rempli de drôlerie et d’éblouissement. Au début du livre, il croit que Rimbaud n’est qu’une Tour. À la fin du roman, il saura que c’était un poète qui dit des choses qui lui semblent vraies et proches. Son Odyssée de l’aube jusqu’au soir, est de celles qui ne s’oublient pas. Pas l’ombre d’un misérabilisme ici : un enchantement de tendresse et d’humour.
Samuel Benchetrit est écrivain, dramaturge, scénariste, réalisateur. Il est notamment l’auteur de Le Cœur en dehors (prix Eugène Dabit du roman populiste 2009), La Nuit avec ma femme, Reviens, des trois premiers volumes de Chroniques de l’asphalte et de Chien, dont il a réalisé les adaptations au cinéma, ainsi que de la pièce Maman qui s’est jouée jusqu’en avril 2023 au Théâtre Edouard VII.